Bonjour à toutes et à tous,
Lors de mon dernier envoi, je vous avais raconté ma traversée de l’Afrique de l’Ouest en auto-stop jusqu’à mon arrivée à Dakar d’où je devais débuter cette discipline tout à fait nouvelle pour moi qu’est le bateau-stop, pratique qui s’est averée être plus difficile que prévu.
En effet, si ma première partie d’auto-stop s’est déroulée sans réelles difficultés, je ne pourrais en dire de même du bateau-stop que, volontairement, je n’avais pas souhaité préparer avant mon départ afin de laisser place à l’aventure.
Le bateau-stop
Afin de trouver un bateau sur lequel embarquer pour traverser l’Atlantique, plusieurs solutions s’offraient à moi sachant que je proposais aux différents responsables de travailler sur le bateau en échange de la traversée. Bilan après plus d’un mois de recherche.
– Les bateaux de croisières : Malheureusement, aucun bateau de croisière ne quitte Dakar pour rejoindre l’Amérique du Sud.
– Les Yachts : Je n’ai trouvé aucun yacht à Dakar partant vers l’Amérique du Sud.
– Voiliers : Traverser l’Atlantique en voilier serait pour moi la solution idéale, je me suis donc rendu à de nombreuses reprises aux différents clubs de voile de Dakar mais malheureusement, la période des vents favorables et donc des nombreux départs vers le Brésil se situe entre la fin du mois d’octobre et le début du mois de février. Par conséquent, aucun voilier présent à Dakar ne partait vers l’Amérique latine (il n’y a qu’une trentaine de voiliers présents et très peu de mouvements).
– Les bateaux de marchandises : Cette solution était la dernière possible pour un départ direct vers le Brésil. La fréquence des départs vers l’Amérique latine est d’environ 1 navire par semaine et je me suis rendu compte petit à petit que les capitaines n’avaient pas de pouvoir de décision pour l’embarquement de passagers (travailler à bord demande un statut de marin impossible à obtenir pour moi en quelques jours) et que les seuls capables de prendre la décision de me faire embarquer sont les armateurs basés en Europe (en Allemagne pour la plupart). Après avoir réussi à obtenir les coordonnées des armateurs (ce qui est un long processus car cela suppose de passer par les consignataires, affrêteurs et autres agents pas toujours coopérants), j’ai dû me résoudre à entendre de nombreuses réponses négatives, les armateurs ne souhaitant pas avoir de passagers à leur bords pour des raisons de sécurité (le contexte international actuel ne jouait pas en ma faveur) et de politique interne (le bateau-stop reste cependant une chose légale ce qui encourage à perseverer).
Devant ces difficultés à trouver un bateau partant de Dakar, nombreux sont ceux qui m’ont suggeré de me rendre soit sur les îles du Cap-vert soit dans les îles Canaries car de nombreux bateaux de toutes sortes venant d’Europe y font escale avant de se rendre en Amérique du Sud.
Etant donné qu’aucun bateau (à ma grande surprise) faisait la liaison Dakar – Cap-vert ou Dakar – Canaries, je me suis donc tourné vers une autre discipline nouvelle : l’avion-stop. Après de multiples démarchages auprès d’avions privés puis de lignes commerciales, j’ai fini par trouver un vol offert par la compagnie Cape-Verdienne TACV de Dakar à Las Palmas aux Canaries où je viens d’arriver (le challenge que je tente suppose de ne payer aucun moyen de transport, l’avion-stop fait donc parti des moyens de transport possibles) et où il y a de nombreux bateaux de toutes sortes, j’aurai donc probablement davantage de chance pour réussir mon entreprise d’ici.
Le choc du changement de culture entre l’Afrique et les Canaries est impressionnant, j’ai l’impression d’être dans un autre monde.
Je ne suis donc toujours pas au Brésil mais je reste persuadé qu’avec un peu de patience et de perseverance, je finirai par y arriver…
Outre le bateau-stop, mon séjour à Dakar m’a permis de vivre quelques experiences sympas :
– Le Takhmarit : Etant logé chez des Sénégalais, j’ai eu le privilège de participer au nouvel an Musulman dans une famille pratiquant l’Islam. Au programme de la soirée : Couscous pour tout le monde par terre autour d’un grand plat à manger avec les mains (manger du couscous pour cette fête est une tradition, tout le monde dans la rue doit, ce soir là, manger à sa faim ce qui encourage le partage), présence d’un marabout expliquant le Coran et les volontés de Allah pendant plus d’une demi-heure (en langue wolof), semoule noyée dans du lait pour le dessert, passage au cimetière pour prier les morts, salutations et pardons les uns envers les autres puis nuit, ou du moins une bonne partie de la nuit, passée à la mosquée pour prier. Lors de cette soirée, il m’a été fait un reproche (gentiment) original soulignant une différence de culture, celui d’avoir pris le thé avec la main gauche car la main gauche ne doit servir qu’aux tâches hygièniques. “Live and learn”.
– Le Lac Rose : Avec le désert Mauritanien, le lac Rose est la merveille naturelle la plus impressionante que j’ai vu depuis le début de ce tour. Ce lac Rose doit sa renommée à sa teinte qui vire du rose au mauve en fonction de l’intensité des rayons solaires, et également au rallye Paris-Dakar dont il constitue l’ultime étape. Le plus impressionnant se passe lorsqu’on se baigne dedans car la très forte teneur en sel (380 grammes dans chaque litre) nous permet de flotter sur l’eau (voir photo ci-dessous). Lors de cette baignade, j’ai eu la mauvaise idée d’ouvrir mes yeux sous l’eau salée et ainsi d’être aveuglé pendant un bon quart d’heure et mes yeux piquaient comme jamais. “Live and learn” une fois de plus.
– La prison : Pour être entré un jour dans le port sans laissez-passer (l’endroit où je fais régulièrement les laissez-passer se situait très loin de l’entrée du port zone nord), j’ai été arrêté par des policiers et mis en prison l’espace d’une quinzaine de minutes. Cette experience assez effrayante m’a permis de me rendre compte à quel point il ne faut pas faire de bêtises avec les lois locales et de voir à quel point les prisonniers Africains sont traités comme du bétail (la cellule était une pièce vide d’environ 10 mètres carrés avec 7 Sénégalais couchés au sol et une odeur insoutenable d’urine). Une experience dont je me souviendrai bien longtemps.
– La vie Sénégalaise : Si on en croie Lamine, le gérant du petit commerce en dessous de l’endroit où j’habitais pendant 1 mois “vivre au Sénégal est une vraie galère, vous les Toubabs (les blancs), vous ne pouvez pas comprendre, ici il n’y a pas de travail et encore moins d’argent. Moi, par exemple, je travaille dur et gagne 200.000 frs (francs CFA = anciens francs français = environ 300 Euros) par mois et avec ça, je dois faire vivre 10 personnes qui sont à la maison et qui n’ont pas de travail, c’est difficile”. Et ce même Lamine de rajouter un petit peu plus tard la larme à l’oeil “Ma première femme est décedée à l’âge de 24 ans, elle était enceinte de notre deuxième enfant et fût emportée par une embolie pulmonaire, les structures Africaines ne permettant pas de la sauver. Si nous avions été en Europe, elle aurait été sauvée sans problème”.
Cas isolé ? Absolument pas, des histoires comme celle de Lamine, j’en ai entendu presque tous les jours et elles se finissaient souvent par “j’aimerais qu’on reste en contact, peut-être pourras tu me faire une lettre d’invitation (NB : document officiel que les citoyens français peuvent faire pour faciliter l’acquisition d’un visa pour les étrangers) afin que je puisse venir vivre en France…”. Une grande majorité des Africains pensent que la vie en France est un vrai paradis.
Il n’est pas evident de parler d’un pays en quelques lignes mais il est vrai que vivre au Sénégal (comme pour la plupart des pays d’Afrique) n’est pas une chose aisée pour une grande partie de la population tant le manque d’éducation (base du problème Africain), le très fort taux de chômage et la pauvreté rendent les choses difficiles. Cependant, ces conditions n’empêchent pas les Sénégalais de garder une bonne humeur incroyable et d’être accueillants comme j’ai rarement vu.
– La ville de Dakar : Grande ville de 1.820.000 habitants, Dakar est aujourd’hui le centre attractif et économique du Sénégal. Cette ville relativement moderne (bien plus que Nouakchott en Mauritanie par exemple) est remplie de contrastes du fait des grosses différences entre riches et pauvres. Un centre ville moderne, quelques très beaux quartiers bien gardés mais autour de nombreuses “maisons” très fragiles avec quelques briques et morceaux de taule où habitent des familles souvent très nombreuses. Malheureusement, Dakar est une ville sale (les gens ont l’habitude de jeter leur déchets par terre et beaucoup urinent dans la rue), polluée (je pense que 95% des voitures ne passeraient pas le contrôle technique en France) et très bruyante (les nombreux taxis klaxonnent tout le temps dès qu’ils sont libres…).
Voilà pour la fin de mon séjour en Afrique, je viens maintenant de retrouver l’Europe (les îles Canaries appartiennent à l’Espagne) et donc l’Euro que je pensais avoir mis de côté pendant longtemps.
J’éspère que les prochaines nouvelles viendront du Brésil.
A bientôt
Ludo
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