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Mon expérience de Street Marketer

Mon expérience de street-marketer

Jeudi, vendredi et samedi 9, 10 et 11 mai 2019, je me suis rendu dans les rues de Brest pour faire une mission de street-marketing. L’expérience fut des plus intéressantes et j’ai souhaité la partager avec vous. Voici le récit de mon expérience et de mon ressenti.

Le street-marketing, vous connaissez ? Peut-être que ce terme anglophone ne vous dit rien mais il ne fait guère de doute que vous avez déjà dû croiser un ou plusieurs individus venant à votre rencontre sourire colgate au visage avec un T-shirt ou une petite veste colorée arborant le logo d’une ONG dy type CARE, Greenpeace, Oxfam, la ligue de protection des oiseaux ou encore Médecins sans frontières.

Comme vous le savez sans doute, j’ai crée en 2012 l’organisation à but non lucratif TRAVEL WITH A MISSION, dont l’objectif est de favoriser l’engagement citoyen, la sensibilisation aux défis planétaires et la réalisation de projets d’intérêt général. Si la plupart d’entre vous connaissent l’organisation pour sa plateforme de Twaming favorisant le partage de connaissances, compétences ou expériences, notre action via bien plus loin avec notamment le développement de projets favorisant l’accès à l’éducation et le dialogue interculturel.

Comme toute association à but non lucratif, l’organisation est à la recherche constante de dons pour financer toutes les actions d’intérêt général menées. Pour ce faire, celle-ci utilise le mécénat d’entreprises, les dons individuels, l’organisation de missions de volontariat encadrées, de voyages solidaires ou encore de Team Building solidaires.

En 2019, le don de particuliers est encore marginal dans le budget de l’association. C’est pour cela que Jérémie Soun, un ami de longue date et membre actif de l’association me répète depuis longtemps : « Ludo, nous devrions organiser une mission de recherche de donateurs dans la rue. Ça marche très bien et ce serait un excellent moyen de financer les actions de TWAM ». Le faisant depuis des années via ONG Conseil, une structure accompagnant toutes sortes d’ONG dans cette démarche, il sait en effet de quoi il parle. Selon ses calculs, il a réussi en 7 ans à récupérer plus de 1 million d’euros pour des associations de toutes sortes par ce biais (à savoir que 95% des dons donnés vont aux grosses associations type Greenpeace, Oxfam, CARE, World Vision, Unicef, etc.).

L’envie ne me manquait pas de mon côté mais je repoussais toujours cette proposition estimant que TWAM devait gagner en maturité. Puis les années ont passé, les actions de TWAM ont grandi… et le fameux moment est arrivé…

Sortir de sa zone de confort

Pour faire une mission de street marketing, la plupart des ONG passent par des agences comme ONG Conseil. Bien que cela soit à l’arrivée un bon moyen de financement pour ces associations, cela implique de sortir de grosses sommes au départ, chose difficile pour la jeune association que nous cherchons à développer. Pour cette première mission, nous avons donc composé avec les moyens du bord impliquant les membres actifs de l’organisation. Aucun d’entre nous n’ayant jamais fait une mission de la sorte, une formation fut nécessaire de la part de notre grand guru Jérémie.

« Ludo, je sais que tu as fait une école de commerce et que tu as fait de la vente dans le passé. Mais chercher de l’argent pour une association dans la rue, ce n’est pas de la vente, ce n’est pas du commerce. Ça n’a rien à voir. Il faut parler avec ton cœur, faire adhérer les gens à la cause que tu souhaites défendre et ne presque pas parler d’argent. Les soutiens viendront naturellement quand les gens auront compris l’importance de TWAM dans le paysage ».

Des conseils plein de bon sens pour le néophyte que je suis. Si m’adresser à des inconnus dans la rue ne me fait pas peur. Arriver à obtenir un soutien financier sur la durée en quelques minutes reste tout de même un joli défi à relever.

« Après la présentation de l’association et de son impact sociétal, il te faut présenter la possibilité du soutien en faisant comprendre son intérêt bien sûr mais surtout en insistant sur le fait que ce doit être un plaisir pour eux et que cela n’impacte pas trop leur quotidien. » me dit Jérémie. Cette dernière notion est très subjective. Si pour certains donner 50 Euros par mois est indolore, d’autres peuvent lutter pour donner 5 Euros par mois.

Savoir gérer les refus

Les petits ruisseaux font les grandes rivières” dit-on. Chaque don et donateur a son importance. C’est dans cet état d’esprit que nous abordons la mission. Mais au-delà du don, simplement faire connaître nos actions a également son importance. Cette mission permettra aussi de trouver des Twamers, prêts à partager connaissances, compétences ou expériences tout en voyageant…

« Je n’ai pas le temps », « ça ne m’intéresse pas », « Je suis pressé »…

A mes demandes répétées de me consacrer 2 petites minutes, 95% des passants semblent s’être mis d’accord pour parfois accélérer leur course, parfois la dévier, parfois regarder leurs pieds ou leur portable avec casque sur la tête (surtout les plus jeunes). Manifestement, la présence des street-marketeurs dérange de nombreuses personnes dans la rue ! Une impression me rappelant celle de mes années d’auto-stop où la persévérance était de mise devant le nombre de réponses négatives reçues.

Savoir gérer les refus est un élément important de l’approche dans la rue. Ne pas les prendre personnellement et faire en sorte qu’ils n’influent pas négativement sur notre mental. Facile à dire, pas toujours facile à faire ! Car certains de nos compatriotes peuvent être très sévères. « Allez vous faire voir ! », « Allez-vous en ! », « Laissez-moi tranquille ! » nous lance-t-on parfois de façon rude alors que de notre côté, le sourire et la bonne humeur restent toujours bien présents. “Je vous souhaite une bonne journée, Monsieur !” leur répond-on ne cherchant jamais à rentrer dans quelconque querelle inutile.

Me trouver là dans la rue à faire ce test et accompagner les équipes est un choix personnel. Non seulement, il ne me paraît pas correct d’envoyer les équipes au charbon et ne pas être présent à leurs côtés, au moins temporairement. Mais de plus, n’ayant jamais tenté l’expérience, je voulais apprendre et me faire ma propre expérience et opinion sur le sujet. J’ai moi-même été démarché à de nombreuses reprises et j’ai toujours répondu en encourageant ces gens qui galèrent toute la journée à trouver des soutiens pour le développement d’actions d’intérêt général.

Des résultats encourageants pour TWAM mais décevants pour moi

Ces 3 jours de présence sur le terrain ne furent pas une sinécure pour moi et, même si j’ai pu trouver quelques soutiens, j’ai été moins bon que je m’en pensais capable. Ce genre de déception arrive. Je n’ai sans doute pas su être suffisamment convaincant dans cette situation. Je le suis en général pourtant dans d’autres contextes. Je me promets de le refaire à l’occasion car je n’aime pas rester sur ce que je considère un échec. Sans doute mon pitch de la rue doit-il être retravaillé ?

Au niveau de l’équipe cependant, les résultats sont plutôt bons et ceux-ci nous encouragent à persévérer dans la démarche.

Une expérience sociologique passionnante

Au-delà du nombre de donateurs trouvés, j’ai trouvé l’expérience sociologiquement parlant absolument passionnante. Comme le stop, ce genre d’expérience favorise la rencontre avec des gens de milieux sociaux et culturels très divers. Comme le stop, les idées préconçues et stéréotypes sont parfois balayés d’un revers de main. Comme le stop, les apprentissages sont nombreux. Dans mon livre « Le Monde en stop, 5 années à l’école de la vie », j’aimais dire sur le ton d’une demi-plaisanterie que pour être candidat à la présidentielle d’un pays, j’aimerais qu’un des critères devrait être d’avoir fait un tour du monde en stop. Un moyen de ne pas être « déconnecté » du monde réel. Une expérience de street-marketer cherchant des fonds pour des associations pourrait aussi ne pas faire de mal aux dirigeants. #humilité

Trouver sa petite phrase d’accroche pour attirer l’attention et faire arrêter les gens n’est jamais chose facile. Lors de mon dernier jour, je me suis amusé pendant quelques heures à tenter une accroche alternative et à approcher les gens en leur demandant si je pouvais leur poser la question suivante : « Que faites-vous pour rendre le monde meilleur ? ». Selon Jérémie, l’approche n’est pas très efficace car trop culpabilisante (il a sans doute raison). Les réponses apportées m’ont cependant parfois fait sourire, parfois presque pleurer… Voici quelques-unes d’entre elles que j’ai notées…

  • « Ma fille travaille dans le social, elle le fait pour moi »,
  • « Je paie mes impôts »
  • « J’essaie de bien élever mes 2 enfants, c’est déjà pas mal »,
  • « Je mets mes mégots dans le cendrier »,
  • « Je paie l’école internationale à ma fille »,
  • « J’attends de mourir. Une personne de moins sur terre lui fera du bien »,
  • « Pas de temps pour ça, j’ai déjà du mal à m’aider moi-même »,
  • « Rien, je ne pense qu’à moi et je l’assume très bien »
  • « Je commence par vous éviter »

J’essayais parfois d’embrayer sur la thématique de l’accès à l’éducation à travers le monde afin de savoir si ce thème les touchait. Les réponses était généralement assez fuyantes et pas très concernées… “Il y a déjà énormément à faire en France” me répond-on parfois. “Nous n’avons pas les moyens de nous soucier des problèmes des autres“…

Loin de moi de vouloir tirer des conclusions générales d’une expérience de 3 jours. Il apparaît cependant assez clairement que dès qu’on touche au portefeuille des gens, la méfiance est de mise. J’ai cependant rencontré des gens soutenant une dizaine d’associations de façon régulière que j’ai pu applaudir des 2 mains. Des petits gestes qui ne changent souvent pas notre quotidien mais qui peuvent changer des vies, quelles que soient les problématiques traitées.

A bientôt

PS : Pour ceux souhaitant donner un coup de pouce aux actions de TWAM, c’est par ici.

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